Parlons de la transmission. On peut distinguer entre la transmission des compétences et la transmission dans l’enseignement. Dans le fond, c’est similaire.
Exercice: Transmission de compétence
La transmission se fait des 2 côtés: l’instructeur qui a le savoir-faire et l’apprenti qui souhaite l’acquérir.
1. L’instructeur – quand il est seul en train de faire ce qu’il compte transmettre – développe ses instructions par un dialogue interne et une structuration (didactique) interne mentale. Exemple: O. commence à tondre et il est seul. Il sait bien ce qu’il faut faire et ne pas faire. En même temps qu’il commence à tout mettre en place (préparations), il s’imagine qu’il y a quelqu’un avec lui à qui il doit transmettre son savoir faire.
Autre exemple: quand A. est seule et se prépare pour peindre une porte, elle pense en même temps comment elle va s’y prendre pour transmettre son savoir-faire. Préparations: quels outils? Où aller en premier? À quoi penser? Etc. Le déroulement de l’action: peindre une porte, par où commencer? À quoi faire attention? Quoi ne pas faire? Etc. Inclure tout bien sûr, de A à Z, aussi ce qui est à faire quand on a fini ce qui est souvent le rangement et le nettoyage.
2. Pour commencer, l’apprenti observe l’instructeur en silence (il ne l’aide pas lors des premières instructions), il écoute.
3. L’apprenti pose des questions et prend des notes s’il le sent. L’instructeur vérifie que l’apprenti a bien compris. Commencer par des choses pas trop complexes, comme par exemple : l’utilisation d’un outil (cuisine ou atelier), etc.
4. Quand l’apprenti sent qu’il est prêt à le faire, il le fait de A à Z sous surveillance minimale de l’instructeur qui n’intervient que lorsque l’apprenti omet quelque chose ou est en train de commettre une erreur.
5. Debriefing.
6. Chaque personne ayant reçu une transmission devient à son tour transmetteur pour la compétence acquise.
J’ai eu le sentiment de m’effacer pour que ce que j’ai à transmettre soit là, sans avoir l’impression que c’était moi qui transmettait.
Deux réflexions sur la transmission dans l’enseignement : La première, c’est le dialogue avec l’instructeur. Il est possible de transmettre via mail, et avant même que je le rencontre de visu, il y avait déjà transmission. Donc la transmission peut se faire sans contact direct. La seconde, c’est que je ne parle pas le français. Et alors même que je ne comprends pas tous les mots, je peux cependant capter une partie du sens avec les émotions, le langage corporel, et écouter les silences.
Pareil pour moi. Il n’est pas toujours nécessaire de comprendre tout.
Focalisez sur ce qui se passe quand vous êtes récepteur d’une transmission.
Je me place dans une ouverture, un état de réception.
Si j’observe plusieurs contextes, j’essaye de voir ce que cela a produit en moi, de commun. Mais c’est forcément lié à la qualité de l’émetteur aussi. Dans mes exemples, à chaque fois, ça me met dans une détente. Comme si la personne qui me transmet, parce qu’elle maîtrise son sujet, est dans une détente.
Peut-être que détente n’est pas le bon mot.
Tranquillité, assurance, certitude mais corporelle.
Les mots qui me viennent, c’est écoute et résonance. Et avec une certaine humilité. Et même si je ne connais pas, il y a une résonance.
C’est l’absence de doute. On en a parlé la dernière fois.
Je connais ça quand des gens viennent me voir pour un problème d’ordinateur, même si je ne connais pas le sujet, je n’ai pas de doute. Je sens qu’ils se détendent. Et je crois que c’est dans le corps, ce n’est pas causé par ce que je dis.
Restons avec la qualité physique, non verbale qui se produit lors d’une transmission.
Il y a une forme d’incitation pour moi. Il y a le soulagement du non-doute, et aussi l’appel pour faire pareil, l’inspiration. Comme une énergie qui tire en avant.
D’où elle vient cette énergie ? Comment elle s’installe ?
Ce n’est pas dans la tête. C’est une inspiration. J’avais eu ça quand j’avais vu l’une d’entre nous laver les vitres. Ça m’avait aspirée et après, je l’ai fait chez moi avec plaisir. Il y a une aisance et une joie.
Une autre facette que j’ai pu observer, c’est qu’il y a toujours du changement. Ce n’est pas « plus de connaissance », mais plutôt un changement de point de vue. Une capacité à mettre de la lumière. C’est n’est pas un ajout, mais une transformation interne pour le récepteur.
J’ai un autre mot pour « pas de doute », c’est un grand OUI à ce qui m’est transmis, à l’enseignement ou quel que soit le sujet.
Je reviens à ce qui a été dit. Il y a une humilité, une acceptation. Le transmetteur peut utiliser n’importe quel moyen pour transmettre. Et tu suis la méthode qu’il choisit. Tu ne la discutes pas.
Ça me donne l’impression que ce dont on est en train de parler, ce sont des prérequis de base. Mais je réalise aussi que de nombreux gens n’ont pas ça : ils vont discuter et remettre en cause. Et alors, l’émetteur ne peut rien faire.
Je connais ça au karaté, où quelques élèves ne suivent pas l’instruction et font à leur façon.
C’est un bon exemple, de comment le récepteur se coupe non seulement de la capacité de s’améliorer, d’acquérir de la compétence, mais aussi de la Baraka qui accompagne celui qui se met dans la bonne attitude pour recevoir. La Baraka, c’est plus que de la chance, c’est la grâce divine. Ça fait partie de l’enseignement.
Parfois, mon professeur de tango me donne des instructions et 6 mois après, autre chose qui semble le contredire. Certains seraient perdus, mais moi je m’en fous car ça se passe dans l’instant. Et de toute façon l’émetteur aussi il évolue.
Il ne faut pas oublier qu’il y a un mouvement permanent. La transmission, ce n’est pas pour que tu fasses comme l’autre. C’est un cadeau qui t’est donné pour que tu puisses le transformer en toi, te l’approprier.
Deux choses : D’abord, la transmission est un phénomène universel, et c’est aux récepteurs de s’adapter à ce qui est transmis à un moment donné (le grand OUI). Peu importe le contexte. C’est aussi vrai de tout bon enseignement, peu importe que ce soit pour apprendre à réparer une voiture ou pour un enseignement spirituel. L’autre chose, c’est l’exemple du maître de tango. C’est exactement ça. Son professeur lui donne des indications qui lui font réarranger ses circuits neuronaux et lui permettent d’aller plus loin et de devenir maître à son tour, parce qu’il aura donné plus que la compétence, il aura donné le plus qui va avec. La partie « transmission » de l’enseignement, comment est-ce que tu le décrirais?
Ce que j’ai dit plus tôt, principalement : « dire OUI ». Ce n’est pas seulement recevoir et comprendre, même si ceci en fait partie, mais c’est surtout la volonté d’accepter que mes réseaux neuronaux se réarrangent. Ce n’est pas quelque chose que je fais, mais je permets que ça se fasse. Sans cela, ça pourrait être une façon d’être un meilleur être humain, mais ce ne serait pas la transmission.
En plus de ce qui a été dit, en repensant à mes maîtres, le mot qui s’impose vraiment, c’est la bienveillance. Pour transmettre, il est nécessaire d’avoir beaucoup de bienveillance.
De la patience aussi.
Oui, je l’inclus dans la bienveillance.
Qu’est-ce qui se passe quand quelque chose est transmis, en dehors de ce qui est transmis ?
Je vois le devoir de celui qui a reçu.
On en a déjà parlé, il me semble. On a parlé de celui qui lance la flèche et de la cible, mais qu’est-ce qui se passe entre ?
Je pense qu’il y a à la fois un accompagnement du groupe, mais aussi, un accompagnement individuel de chacun.
Personnellement, je vois une montée, une élévation des deux, de celui qui transmet et de celui qui reçoit, mais je ne sais pas si c’est cela que tu vises.
Ça se rapproche.
C’est comme si chacun passait à une octave supérieur.
C’est comme s’il y avait une troisième force, comme si la transmission ne se faisait pas entre deux personnes, mais qu’il y avait un troisième qui surgit et qui s’avère être le plus important, ce autour de qui la tension des 2 converge, comme s’il y avait la naissance d’un troisième.
Il y a quelque chose que j’ai réalisé il y a longtemps. C’est qu’en tant que receveur, je dois aussi solliciter la valeur de base du transmetteur, qui ne peut s’exprimer que si je suis là. Donc j’ai une responsabilité à solliciter ça comme le transmetteur a une responsabilité à transmettre.
Le transmetteur qui a l’expérience de la conscience, te transmet la prise de conscience pour que tu puisses faire grandir la conscience.
Ça se rapproche. Quand on met de côté tous les mots, qu’est ce qui reste à propos de la transmission ?
La connexion.
C’est comme de brancher la machine à café sur la prise. C’est bien, mais qu’est-ce qui se passe ?
Il y a un flux d’énergie.
Oui et quel est le lien entre le flux d’énergie et la transmission ?
Ce n’est pas dans une seule direction, ça va dans les deux sens.
Ok, mais qu’est ce qui fait que le café sort ?
Il y a une certaine transformation. L’énergie est transformée mais ne disparaît pas.
Donc, dans la transmission, il y a transformation. Quelle est la part de la transmission qui transforme ? Comment vous le vivez, ici, dans l’enseignement ?
Pour moi, il y a des choses qui se font toute seules. On peut faire le travail, on parle, mais j’ai l’impression qu’il y a des choses qui s’affirment toute seules en moi, mais ça se fait sans moi ; je peux constater que ça se fait.
Tu parles de la partie transformation ; et quelle est la part de la transmission ?
La part de la transmission, c’est qu’il y a des morceaux de l’enseignement que je peux ré-exprimer à mon tour.
Bien sûr, mais ce n’est pas ce que je vise ici. On vient de voir qu’il y a deux processus liés, la transmission et la transformation, et qui se passent au niveau non verbal, quoique parfois déclenchés par les mots et par des processus linguistiques, mais aussi par mes gestes. Est-ce que vous en avez conscience ?
Il doit y avoir une résonance dans le receveur pour que ça se passe. Comme une radio, si on ne l’accorde pas bien, on ne reçoit rien.
Certes. Et c’est ce que je fais depuis le début. Maintenant, vous le savez. 🙂
Pour moi, c’est une évidence !
Oui, mais je ne l’ai jamais dit. Et pour certains, ça ne l’est peut-être pas.
Finalement, tu es en train de nous expliquer que tu es un enseignant et que tu enseignes? (rires)
Ce n’était pas connu de certains ici ?
J’avais une confiance totale, mais je ne savais pas pourquoi. Donc, pour moi, ce n’était pas si évident.
La confiance en quoi ?
La confiance en l’enseignant ici. Savoir qu’il est un maître qui me guide.
Vers quoi ?
Vers plus de conscience, vers se trouver soi-même.
Dans son cas, elle ne savait pas comment cela fonctionne ; et les autres ?
Pour moi, ça n’est toujours pas clair. Je ne sais pas si je sais de quoi vous parlez, mais que je ne comprends pas les mots que vous mettez dessus ou si vous parlez de quelque chose dont je n’ai pas conscience. Par exemple, sur la transmission silencieuse, je peux faire des grands fantasmes dessus.
Je n’ai pas parlé de la transmission silencieuse.
D’autres en ont parlé, et on a aussi parlé du non-verbal.
Le non-verbal n’est pas silence. J’ai simplement expliqué comment je m’y prends pour transmettre. Je l’ai clairement dit. Certains l’ont bien compris, non ?
Pour moi, c’est clair que ta façon de parler et de dire des choses à certains moments, était un moyen de déclencher quelque chose chez moi. Mais je ne peux pas imaginer qu’on puisse faire autrement.
Je n’aurais peut-être pas parlé des gestes et je ne l’aurais pas conscientisé comme ça. Mais ça me paraît évident quand tu le dis.
Pour moi, c’est pareil. Il est clair que tu pointes chez chacun ce qui doit être mis à jour chez lui, et éventuellement, produire la souffrance utile.
D’accord, mais ça c’est déjà trop dans le contenu. Ce que j’ai dit, c’est que ça passe par les mots et par les gestes.
Oui. Par les mots et les gestes. Par exemple, je me souviens de 2 ou 3 fois où tu as posé ta main sur mon épaule et où, pour moi, subitement, ça avait une certaine valeur : ce n’était pas juste une main sur une épaule ; et ça faisait effectivement résonner quelque chose en moi.
Pour moi c’est complètement évident. Quoique tu fasses ou dises, tu as une façon de parler à chacun en particulier, avec les mots et les gestes.
Oui, pour moi aussi. Et pour les gestes, je dirais surtout le regard.
Et le rire aussi, ça fait partie des gestes !
Mais il y a une différence entre lui et Napoléon, le grand dictateur français. Les deux manipulent avec les mots et les gestes, mais dans le cas de Napoléon, c’est dans l’intérêt personnel (rires).
Bien sûr, les grands dictateurs manipulent, mais ils ne transmettent pas et ils ne génèrent pas de la transformation chez les autres.
Pour transmettre, est-ce qu’il ne faut pas que tout ton être participe ? Ce qui est impossible pour les dictateurs.
Pour moi, ça se fait tout seul.
Ce que je veux dire, c’est que ça ne pourrait pas se produire sans tout ton être. Tu ne peux pas le faire avec une partie seulement.
De ce point de vue, je suis entièrement transparent. Il n’y a rien de plus que ce que je montre ici.
Il n’y a pas de séparation entre la valeur de base de chacun et l’enseignant. Quelque part, il ne s’agit pas d’un rapport entre deux personnes.
Plus généralement, est-ce qu’il pourrait y avoir une séparation entre les valeurs de base (de deux personnes) ?
(Le groupe unanime) : Non.
(à A.) : Et pour toi, est-ce que c’est évident ou pas ?
A. : Je ne vois pas beaucoup de différence entre les positions. C’est évident, mais ce ne sont pas les mots qui me parlent. En revanche, le ton de la voix, beaucoup. Comme une espèce de bombardement, comme lorsque parle une radio. Bombardé par quelque chose dont je ne sais pas exactement ce que c’est, mais qui révèle. C’est plutôt cette image que j’ai.
J’ajouterais que l’enseignant, il donne du poids. C’est comme un lest qui permet de rester ancré.
Le regard, la présence, et les mots aussi.
On a parlé du tango et le maître enseigne avec ses mots et ses gestes aussi.
Oui et c’est pour ça que je me demandais si c’était possible autrement.
Sûrement, c’est possible. Il y en a qui enseignent par le silence. Ça peut prendre d’autres formes, par la peinture, par la musique.
Concernant mon maestro de tango, c’est extrêmement clair que sa transmission passe par sa gestuelle et par les mots qu’il emploie.
Et la façon dont il les emploie.
Absolument. C’est aussi le feed-back de ceux qui reçoivent ses enseignements. Pendant les cours, ils sont dans un état particulier.
Parce qu’il les « dirige » avec les mots et des gestes.
Ce qui est frappant, c’est que lui, le maestro, il n’en a pas conscience.
C’est possible, mais peut-être qu’il sait aussi certaines choses.
J’en ai parlé avec lui, et il y a des choses dont il est conscient, mais d’autres non.
Il y a aussi peut-être des choses dont il est conscient mais dont il ne veut pas te parler, parce que ce n’est pas encore le bon moment.
C’est possible.
Je crois que ça, c’est très important avec toi. Dans ton enseignement, il y a les mots, les gestes, mais aussi ce qui n’est pas visible, ce qui n’est pas exprimé. Il y a une retenue, une pudeur et c’est ça qui est le plus fort.
Une prudence, un respect.
Et un élément que j’ajouterais, c’est la notion de timing. Les mots ou les gestes ne tombent pas n’importe quand, mais au moment juste. Et ce ne serait pas le même mot ou la même force en fonction du moment.
Et la pudeur aussi, j’y tiens. Ne pas tout dévoiler. Ce n’est pas « réservé », c’est « pudique ». Si tu veux, c’est la première fois qu’il exprime ce qu’il dit aujourd’hui, sur comment il enseigne, c’est comme si il se mettait à nu. Et moi, je le voyais déjà à nu, mais lui restait pudique. Il s’en fout, en réalité, mais c’est par prudence. Et aujourd’hui, il l’expose.
Oui, et ça rentre dans la notion de timing qui vient d’être exprimée. Là, aujourd’hui, je sentais que c’était le moment.
Ce qui est drôle, c’est la transmission sur la transmission.
Oui, c’est exactement ça.
***
On va continuer sur la transmission. Il y a le verbal et le non-verbal, mais aussi une troisième force inconnue, une force réorganisatrice des neurones. C’est la même force qui te transforme quand tu accueilles la souffrance nécessaire. Il ne peut pas y avoir de vrai enseignement sans cette composante. C’est ça qui crée la transformation.
On peut dire que c’est une intégration qui s’installe, qui sans explication, sonne juste en soi.
Qu’est ce qui se passe à l’intérieur de celui qui reçoit ?
Quand j’ai fait ma formation en constellation familiale, c’était en allemand, et mon allemand n’était pas très bon, donc j’étais obligé d’être plus dans le ressenti et l’observation. En général, quand il y a des mots, surtout sur quelque chose de nouveau, il y a des représentations qui bloquent ou gênent l’écoute directe et la transmission. Pour un sujet nouveau, c’est mieux de couper le mental pour être plus présent.
C’est d’abord gratitude et humilité. Il y a quelque chose de l’ordre de la révérence.
Ce qui me vient, c’est une double reconnaissance : reconnaissance de quelque chose en moi et ensuite, vis-à-vis du transmetteur.
Il y a une sorte d’Eureka. Et je me demande même si c’est possible de recevoir quelque chose qu’on ne sait pas déjà. Comme si les transmissions les plus fortes étaient celles qui me permettent d’accéder à une re-connaissance de qui était déjà à l’intérieur, et ceci me mène au vide.
Comme le disait Rajneesh (Osho) : vous venez avec votre ego et mon rôle, c’est de trouver la brèche pour aller là où il n’y a pas d’ego. Tout le monde a un ego, ou il reste des scories de l’ego. Pour découvrir ce qu’il y a derrière, avec la transmission, c’est plus facile puisque vous êtes ouverts en ayant accepté de baisser vos défenses. Comme le dit Stephen Wolinski : le maître est de ton coté, donc tu t’ouvres à lui et là, il peut transmettre.
Quand on parle de reconnaissance de ce qui était déjà là, ce que j’entends c’est un OUI de toute éternité. Et c’est ça la différence entre les petits Eureka et l’EUREKA.
En très simple, l’enseignant donne la main, je la prends, et la main dans la main, je dis « merci ». Et ce merci n’est pas un merci de l’un vers l’autre, c’est un merci plus haut qu’un simple merci. Et si tu donnes la main, ça ne suffit pas, il faut que l’autre la prenne. Et dans ce lien, le mystère.
Il y a aussi ce mot de « vérité ». Dans la transmission, il y a un ressenti de la vérité. Même quand je ne comprends pas les mots, je sais que c’est vrai. Parfois, je sais que c’est exactement ça, sans pour autant savoir le formuler.
Je ressens un immense merci, à propos du partage d’hier soir, sur ta façon d’enseigner. Ça m’a parlé et j’ai l’impression de savoir un peu plus ce qu’est la conscience corporelle.
J’ai l’impression d’être les deux : générateur et receveur. C’est comme une boucle, une roue.
Et où est la transmission : de quoi, de qui, vers qui ?
Au niveau physique, tu me transmets mais c’est beaucoup plus que ça. C’est la vie qui transmet à la vie. Il y a une forme d’accord, de résonance. C’est comme quand tu marches dans un nuage de brouillard, au début tu sens juste un peu d’humidité, mais à la fin, tu es trempé. Il est difficile de pointer le moment précis où quelque chose a été transmis. Mais je note que plus tard, quelqu’un va mentionner quelque chose, et je reconnais la vérité derrière.
Est-ce que ça veut dire que la vérité déjà en toi est révélée par la transmission ?
Oui.
Qu’est-ce qui t’empêche de vivre cette vérité en permanence ?
Être marié (rires). Plus sérieusement, il y a une appréhension que si des merdes arrivent, je n’arriverai pas à retrouver la conscience corporelle.
C’est une menace permanente pour nous tous ici. Pour ceux qui ont lu Asterix & Obelix, il y a toujours la peur que « le ciel nous tombe sur la tête ». Mais c’est facile de vivre avec ça : tant que ça n’arrive pas, c’est ok. Autrement dit, il est inutile de se soucier de ça. Il y a toujours un doute, mais c’est ok. Ce doute est un rappel qu’il faut toujours rester dans l’humilité. On n’est jamais sûr. La Grâce vient et repart. Cela ne dépend pas de nous. Tu as été touché par la Grâce quand tu avais 19 ans. Elle ne t’a jamais quitté. Tu peux être reconnaissant pour ça. La seule chose que tu peux faire, c’est de ne pas tomber dans l’oubli. Le reste ne dépend pas de toi.